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Interview n°1
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Karma au beau fixe pour le bon soldat du reggae, reparti à Tough Gong pour ensoleiller son quatrième album jamaïcain. "Dépareillé", Pierpoljak ? Le cultivateur moderne n'a rien perdu en verve : sale temps pour les Parisiens, poinçonneurs et autres journaleux.

Après le carton Kingston Karma et l'album collectif Plus de cœur égal soleil, comment t'es-tu remotivé ?

Je suis toujours motivé. Personne ne m'a tanné en disant " t'as un album à faire ". J'emmagasine des impressions. Dès que j'ai le quota, j'en fais un disque. Je le trouve meilleur que tout ce que j'ai fait avant mais c'est pas à moi de juger la qualité. Le disque appartient au public. C'est à lui de juger.

Un album de plus enregistré à Tough Gong…

Tough gong, c'est le surnom de Bob Marley. Tough pour " dur ". Gong pour, le crâne du mitan, du chef. C'est le quatrième disque que j'enregistre dans le studio de Marley. Sans prétendre que c'est chez moi, j'en connais les moindres recoins. Je ne vais pas là-bas parce que c'est chez Marley. C'est l'endroit qui sonne le mieux en Jamaïque et pour ma musique.

Le titre de l'album, J'fais c'que j'veux : un sursaut d'indépendance ?

Je ne veux pas rentrer dans les plans "Je trouve que mon album est plus ceci-cela, plus indépendant, plus mature". Je suis qu'un petit chanteur des rues. J'ai pas fait les cours dramatiques pour expliquer la situation.

Est-ce primordial pour toi d'avoir un son jamaïcain, authentique, plutôt que de faire du reggae d'importation ?

C'est la Providence : j'ai cette chance de pouvoir faire la musique que j'aime dans le pays d'où elle vient. Le reste, je le vis par rapport aux éléments, au St-Esprit du reggae (rires). J'ai toujours aimé ce pays. Le rêve, c'est de se retrouver en studio avec les gars qui jouaient sur les disques que j'écoutais.

Petite explication de texte : dans Dépareillé, tu chantes "Blanc c'est Diable et noir c'est Dieu"…

Le reggae, c 'est avant tout la musique du peuple noir. A Kingston, je suis le seul blanc en studio. Il ne faut pas se leurrer : le Reggae music ne chante pas vraiment les louanges du blanc. Les actions des blancs ont souvent été sournoises et négatives dans le passé. C'est normal qu'ils n'aient pas confiance. Cela dit, je trouve la Jamaïque très civilisée comparée à bon nombre d'autres pays. Les Jamaïcains m'ont accepté parce que je suis sincère, que j'arrive sans prétention, en disant simplement je suis chanteur de reggae. Si tu aimes vraiment cette musique et que tu connais leur culture, tu es vite des leurs.

Est-ce que tu te sens toujours en rébellion, malgré le succès commercial ?

C'est quoi, être rebelle : jouer les James Dean ? Je suis pas d'accord avec les rouages du système. Mais ça fait pas de moi un rebelle. Les vrais rebelles sont ceux qui prennent les armes pour défendre leur pays face à l'oppression. C'est pas dans une chambre ou un café à Paris qu'on peu se rebeller. Paris, c'est beaucoup de jactance et peu d'actes.

Quand on te dit "gardien du temple" du reggae, flatté ou agacé ?

Ca dépend dans quel sens. C'est un peu prétentieux. Je me sens plutôt comme un soldat du reggae, au service de la musique jamaïcaine.

Le reggae est-il simplement une musique pour toi. Est-ce que ça implique une philosophie, une religion ?

C'est une musique, rien d'autre. Après ça, la religion, la philo, fumer ou pas, c'est d'autres problèmes. Le reggae, c'est comme la valse : il a les codes musicaux, les façons de jouer le one drop…

Tes maîtres, ceux qui t'ont mis sur la voie ?

Burning Spear, Dennis Brown, pour le chant, Slim Smith, Tenor Saw. Sans oublier le plus grand : Marley, tout simplement.

Il paraît que pendant l'enregistrement de Je fais c'que j'veux, tu travaillais sur un disque en anglais ?

Exact. Avec pas mal de duos : avec Horace Andy, Junior Kelly, Anthony B… Je suis juste chanteur. Les textes et des mélodies ne sont pas de moi. Un exercice de " style ".

Toujours "en guerre avec la Ratepeu et la Senecefe" ?

J'ai jamais pu les supporter. Comment peut-on faire ce taf ? Même pour nourrir sa famille. C'est horrible. Depuis que j'ai ma voiture, je ne fais plus le " petit jeu " avec eux. Mais quand je les vois au bord des guichets attendre leur proie comme des misérables… Ignoble.

On peut imaginer que tu sortes un jour du reggae ?

Tout est imaginable. Si je chante un jour sur des beat hip hop, je resterai dans le " boom boom ", le style dancehall. Je m'sens pas encore prêt à négocier le tournant.